SeroCovBKO
Etude de Sero-prévalence du COVID19 dans la Commune VI du district de Bamako et le district sanitaire de Tombouctou, Mali
Procéder à une première analyse de l’épidémie de coronavirus au Mali, afin de mieux la connaitre, la comprendre et la combattre
Procéder à une estimation de la réalité des indicateurs de l’épidémie de COVID-19 au Mali,
Identifier les principaux facteurs qui ont contribué à l’évolution de l’épidémie au sein de la population,
Déterminer, à la lumière des faits, les mesures les plus appropriées à prendre pour combattre une telle épidémie
Jordi Landier (SESSTIM, France, Marc Karim Bendiane (SESSTIM, France), Luis Sagaon (SESSTIM, France), Laurent Vidal (SESSTIM, France), Issaka Sagara (PI, MRTC, Mali & SESSTIM, France), Abdoulaye Djimde (MRTC, Mali), Mady Cissoo (MRTC, Mali & SESSTIM, France), Abdoulaye Katile (MRTC, Mali & SESSTIM, France), Bourema Kouriba (CICM, Mali), Abdoul Karim Sangare (CICM, Mali), Elisabeth Sogodogo (CICM, Mali), Karyn Coulibaly (CICM, Mali), Ibrahima Berthé (Min. Santé, Mali), Abdoulaye Guindo (Min. Santé, Mali), Ousmane Dembelé (Min. Santé, Mali), Souleymane Sanogo (Min. Santé, Mali), Zoumana Doumbia (Min. Santé, Mali), Charle Dara (Min. Santé, Mali), Mathias Altman (ISPED, France), Emmanuel Bonnet (IRD, France), Hubert Balique
Ambassade de France au Mali, IRD, Fondation Mérieux
Malaria Research and Training Center (MRTC) Faculté de Médecine, et Odonto-Stomatologie (FMOS) & Faculté de Pharmacie (FAPH), Université des Sciences, Techniques et Technologies de Bamako (USTTB)
Centre d’Infectiologie Charles Mérieux à Bamako (CICM-Mali), Bamako, Mali
Direction Générale de la Santé et de l’Hygiène Publique, Ministère de la Santé et des Affaires Sociales, Mali
Bordeaux Population Health, U1219, Inserm, ISPED
Unité Résilience, IRD
L'épidémie de COVID-19, qui a débuté en novembre 2019 à Wuhan (Chine), s'est rapidement propagée dans le monde entier a été déclarée « pandémie » le 11 mars 2020 par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Malgré les efforts de distanciation physique, de confinement, de quatorzaine, déployés au niveau mondial, la région africaine de l’OMS semble plus faiblement touchée à ce jour. Toutefois, la charge réelle du COVID-19 en Afrique est encore mal connue. Dans de nombreux pays, les moyens diagnostiques et l’accès aux soins étant limités, la confirmation biologique a été réservée aux patients graves et/ou aux groupes à haut risque. Ainsi, de nombreux cas ne sont pas détectés. La proportion de personnes infectées par le SRAS-CoV-2 et qui restent asymptomatiques pendant toute la durée de l'infection n'a pas encore été évaluée (1, 2). Il est essentiel de comprendre le rôle que ces infections asymptomatiques ou pauci-symptomatiques jouent dans la transmission et la propagation de l'épidémie pour élaborer et mettre en œuvre des stratégies de santé publique visant à contrôler la transmission. Une étude récente a estimé que 82 à 90 % des infections survenues dans 375 villes de Chine avant les restrictions de voyage n'avaient pas été signalées et que cela pourrait représenter la source d'infection pour 79 % de tous les cas confirmés (3). À mesure que l'épidémie évolue, il est urgent de développer les activités de santé publique afin d'élucider l'épidémiologie du nouveau virus et de caractériser son impact potentiel (4).
Le nombre réel de personnes infectées par le virus est inconnu. Depuis le début de l'épidémie, les différents pays ont utilisé des approches et des critères de test différents, en fonction de leurs ressources et de leurs capacités (5). Ainsi, la charge de la maladie au niveau communautaire doit encore être déterminée. Afin d'estimer le nombre réel de personnes infectées, il est essentiel de comprendre le rôle potentiel des cas asymptomatiques ou pauci-symptomatiques dans la propagation du COVID-19.
En Mai 2020, le Mali a enregistré 1265 cas de coronavirus diagnostiqués par RT-PCR, soit un taux d’incidence de 0,007 % pour l’ensemble du pays. Répartis sur 31 districts sanitaires, ils ont conduit à 716 guérisons (soit 55,7 %) et à 77 décès (dont 30 hors centres de traitement), soit un taux de létalité de 6,1 %. Par ailleurs, 6578 prélèvements ont été analysés, et 8651 personnes contacts ont été ou sont suivies par les services de santé.
On peut ainsi constater que 64,8 % des cas enregistrés sont situés dans le Grand Bamako, qui regroupe le District de Bamako et le cercle de Kati, soit un taux d’incidence de 0,02% pour une population d’au moins 3,5 millions d’habitants et le deuxième foyer avec le grand nombre de cas est le district sanitaire de Tombouctou avec plus de 407 cas confirmés. L’évolution épidémique est marqué par des cas sporadiques dans les autres régions du Mali ou pour l’instant modérée. Plusieurs hypothèses peuvent être émises pour expliquer ce constat :
Les unes ont de solides fondements scientifiques :
La faiblesse du système de soins, qui limite fortement le nombre de nouveaux cas rapportés. On est en droit de considérer que les cas diagnostiqués ne sont que la partie émergée de l’iceberg,
La jeunesse de la population malienne dont 92 % est âgée de moins de 50 ans et 74 % de moins de 30 ans,
Des échanges internationaux commerciaux plus faibles à l’origine d’un nombre de cas importés initial plus faible (faible « inoculum »),
La grande dispersion de la population, ce qui est réel pour l’ensemble du pays qui compte environ 10 000 villages et 30 000 hameaux, mais très discutable pour Bamako, où la majorité des familles sont proches et partagent la même cour,
Une organisation socio-économique spécifique,
Un mode de vie et d’activité majoritairement extérieur à moindre risque de transmission.
D’autres ne reposent à ce jour sur aucune démonstration et demandent à être validées selon les normes scientifiques, avant d’être retenues :
Les effets de la chaleur sur le virus,
La résistance particulière au virus de la population, soumise dès ses premières années de vie à de très nombreuses infections,
Le développement en Afrique Subsaharienne de souches virales moins contagieuses que les autres.
En regard d’un faible accès au diagnostic et aux soins, le faible nombre de cas rapporté ne permet pas, à l’heure actuelle, de trancher entre une sous-estimation de l’épidémie ou une épidémie d’ampleur modérée. En outre, il est fondamental d'évaluer le niveau d'immunité collective qui a été développé, ce qui détermine le risque d'une épidémie à grande échelle. Il est donc nécessaire d'étudier la séroprévalence des anticorps spécifiques de COVID-19 au niveau communautaire. En outre, la mesure de l'immunité pourrait également aider à programmer un calendrier pour la levée des contraintes. Les études de séroprévalence sont l'outil disponible le plus efficace pour signaler l'exposition d'une population aux infections. La surveillance séro-épidémiologique, basée sur la détection de la présence d'anticorps contre COVID-19 (type IgM / IgG) dans le sérum, dans un échantillon représentatif de la population, est essentielle pour faire des déductions sur l'épidémie de COVID-19.
Conformément au protocole harmonisé de l'OMS pour les enquêtes séro-épidémiologiques en population stratifiée par âge pour l'infection par le virus COVID-19, une enquête transversale auprès des ménages sera réalisée (6). Une méthode d'échantillonnage en grappes à plusieurs degrés sera utilisée. L’enquête transversale concernera tous les groupes d’âge de la population.
Sites
L'étude sera menée dans le district de Tombouctou (Commune urbaine de Tombouctou) et dans les 3 quartiers prioritaires, les plus touchés de la commune VI de Bamako (Figure 2) : Faladié, Banakabougou, et Yirimadjo. Le nombre de cas rapportés a été de 38, 29 et 40 respectivement pour ces quartiers, soit un taux de prévalence de 0,07%, correspondant à 54% des cas de la commune IV. Le second site de l’étude, commune urbaine de Tombouctou compte 407 cas pour les 8 quartiers.